« Gérald Darmanin demande la levée des barrages. C’est NON, on le rappelle, nous attendons des actes, pas des paroles. » Ce dimanche, le ministre de l’Intérieur, à Mayotte pour une visite express avec la nouvelle ministre déléguée chargée des outre-mer, Marie Guévenoux, a peu convaincu. Les représentants de l’État ont pourtant fait le déplacement pour apaiser les tensions grâce à des annonces chocs.
A peine arrivé sur le tarmac de l’aéroport, Gérald Darmanin annonçait la fin du droit du sol à Mayotte. « Nous avons pris une décision radicale, dans le cadre d’une révision constitutionnelle. Il ne sera plus possible de devenir français si on n’est pas enfant de parents français. L’objectif est de réduire littéralement l’attractivité du territoire. »
Réduire de « 90 % les titres de séjour à Mayotte »
La veille, sur ses réseaux sociaux, le ministre de l’Intérieur avait déjà annoncé une nouvelle « opération d’ampleur pour lutter contre l’immigration illégale et la délinquance. » Un Wuambushu 2. L’avion arrivé de métropole transportait d’ailleurs 15 militaires du GIGN.
En parallèle, le ministre a déclaré qu’il souhaitait réduire de « 90 % les titres de séjour à Mayotte. » Notamment grâce aux nouvelles mesures de la loi immigration, qui durcissent les conditions de regroupement familial sur le territoire. « Auparavant, il fallait une présence de 18 mois sur le territoire national et un titre de séjour d’un an pour faire venir sa famille. C’est une des raisons de l’immigration importante à Mayotte, qui dérègle les services publics. Désormais, la condition est de résider sur le territoire depuis trois ans et d’avoir un titre de séjour d’au moins cinq ans », a-t-il précisé.
La fin du visa territorialisé
Dernière mesure d’importance : la fin du visa territorialisé, qui empêche les détendeurs d’un titre de séjour à Mayotte, de se rendre en métropole ou dans d’autres territoires d’outre-mer. Cette nouvelle mesure sera voté dans le cadre de la prochaine loi Mayotte.
Il s’agit d’ailleurs de l’une des principales revendications du collectif des « forces vives », qui paralysent le territoire depuis le 22 janvier, via des barrages routiers aux quatre coins de l’île. « Nous sommes là pour vous dire qu’on vous a entendu », a insisté le ministre de l’Intérieur.
« Mayotte en colère »
A son arrivé à Mamoudzou, l’accueil a pourtant été glacial. Derrière les sifflements et les cris, des chants de révolte et des « Mayotte en colère », scandés par une poignée de manifestants, attendaient le représentant de l’État. « On attend de voir, on ne fait que de nous mentir », s’agace Charifati*, assise sur le quai.
« Ces mesures ne suffisent pas, peste de son côté, Roukia*. Les violences, c’est tous les jours. Même le matin on est caillassé, on n’en peut plus. » Une amertume partagée par Zafira Ahmed, membre des forces vives, « on veut du concret maintenant. On ne lèvera les barrages que si on a des engagements fermes et des preuves. La loi Mayotte c’est bien mais quand sera-t-elle mise en application ? »
Les députés de Mayotte souligne quant à eux, une « décision historique. » « On ne touche pas à la constitution sans avoir la main qui tremble. Mais Mayotte ne tremble pas, elle est en train de s’écrouler », estime Estelle Youssouffa, députée Liot de Mayotte. Mansour Kamardine remercie de son côté « la mobilisation citoyenne qui a permis de contraindre le gouvernement à prendre les mesures demandées depuis des années par les élus. » Mais il souligne qu’il « convient de passer des annonces à leur mise en œuvre, dans les meilleurs délais, afin que les mesures annoncées ne deviennent pas rapidement d’habituelles promesses en l’air. »
L’abolition du droit du sol doit être adoptée par le Parlement
Désormais, l’abolition du droit du sol devra être adoptée par le Parlement. « Aujourd’hui, notre mission est de convaincre. Il va falloir voter dans le bon sens parce que c’est la demande de toute la population et de tous les élus », insiste Estelle Youssouffa.
Après près de trois heures de négociations avec les élus locaux et les représentants des « forces vives », Gérald Darmanin a précisé que le collectif attendait « un courrier d’engagement. » Une lettre qui devrait leur être adressée dès le début de semaine. « J’ai cru comprendre, qu’après avoir reçu ce courrier, les barrages seraient levés », a-t-il précisé.