Officiellement, 40 décès ont été confirmés par les autorités, mais 41 personnes restent portées disparues rapporte le Journal de Mayotte. Un chiffre que certains jugent bien en dessous de la réalité, alimentant le débat sur un possible manque de transparence des services de l’État.
Dans les heures qui ont suivi la catastrophe, des centaines de familles ont afflué vers le Centre hospitalier de Mayotte pour déclarer leurs proches disparus ou demander des certificats de décès. Mais face à l’urgence et à l’afflux de blessés, beaucoup sont repartis sans documents officiels, laissant planer le doute sur le nombre réel de victimes.
Le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, reconnaît la complexité du décompte. Outre les morts recensés à l’hôpital, des « tombes fraîches » ont été découvertes après la tempête, souvent creusées en urgence par les familles elles-mêmes, conformément aux rites funéraires locaux. Ces inhumations précipitées, sans autopsie ni certificat officiel, compliquent l’établissement d’un bilan fiable.
Dans les premiers jours, les autorités évoquaient prudemment « plusieurs centaines » de morts, certains redoutant même un bilan bien plus lourd. Puis, le discours s’est ajusté : en décembre, le Premier ministre François Bayrou a évoqué « des dizaines de victimes », excluant l’idée d’un bilan catastrophique.
Mais cette révision à la baisse suscite des interrogations. Le sénateur Saïd Omar Oili a demandé, sans réponse, la création d’une commission d’enquête sur la gestion de la crise. « Quand on va dans les quartiers, il y a des visages qui ont disparu. Où sont-ils ? » s’inquiète-t-il.
L’ancienne directrice de l’Agence régionale de santé de Mayotte, Dominique Voynet, partage cette méfiance. « Tout le monde sait que le bilan est plus important, c’est l’éléphant au milieu de la pièce », affirme-t-elle, appelant le gouvernement à fournir un chiffre exhaustif.
Si les secours ont été déployés rapidement après la levée de l’alerte violette, l’accès aux zones sinistrées a longtemps été entravé par des routes impraticables et des coupures de communication. Pendant plusieurs jours, Mayotte était plongée dans un silence assourdissant, sans eau, sans électricité, sans réseau.
Dans ce chaos, certaines familles en situation irrégulière auraient préféré taire leurs pertes, par peur des autorités. Un phénomène que le préfet lui-même reconnaît : « Beaucoup n’ont pas déclaré leurs morts pour des raisons que l’on peut comprendre. »
Face à cette incertitude, la préfecture admet que le bilan pourra évoluer, en fonction de nouveaux signalements. Mais l’heure est déjà à la reconstruction, et pour certains, ce décompte inachevé est une blessure supplémentaire. « Rebâtir Mayotte sans connaître le véritable nombre de morts, c’est effacer une partie de notre histoire », conclut un habitant.