Parmi les six prévenus, un visage a attiré l’attention : celui d’un ancien agent de la Police aux Frontières (PAF), accusé d’avoir joué un rôle clé dans cette organisation rapporte le Journal de Mayotte.
L’affaire remonte à 2019, lorsque les autorités découvrent, grâce aux confidences d’un informateur comorien, l’existence d’une entreprise criminelle facilitant l’immigration clandestine. L’individu, expulsé de Mayotte fin 2018, livre des informations cruciales aux enquêteurs, dévoilant ainsi un réseau bien rodé qui aurait organisé des dizaines de traversées pour des centaines de passagers, à raison de trois voyages par semaine.
L’un des principaux accusés, ancien fonctionnaire de la PAF, aurait profité de sa position pour avertir les passeurs de la présence des intercepteurs maritimes. Grâce à ses informations, les kwassa-kwassa, ces embarcations de fortune, échappaient aux patrouilles des autorités. Il est reproché à l’ex-agent d’avoir non seulement trahi ses collègues, mais également orchestré en partie ce trafic humain moyennant des sommes conséquentes.
Le réseau comptait divers acteurs : guetteurs, logisticiens, rabatteurs, et même une comptable officieuse qui tenait les comptes des sommes récoltées, bien qu’elle nie toute implication formelle dans le réseau. L’argent, entre 300 et 500 euros par personne, transitait régulièrement entre Anjouan et Mayotte, permettant à de nombreuses personnes en situation irrégulière de franchir les eaux dangereuses.
Face aux preuves accablantes, l’ancien policier a tenté de minimiser son rôle, niant toute connaissance directe des passeurs. Cependant, les écoutes téléphoniques et les témoignages le placent au cœur du dispositif. Il aurait même fait appel à des travailleurs clandestins pour des travaux sur sa maison, soulignant l’ampleur de son implication. À la barre, il a exprimé ses regrets, évoquant des difficultés financières et des choix malheureux. « Si je pouvais revenir en arrière, je le ferais », a-t-il confessé.
Le substitut du procureur n’a pas manqué de souligner la gravité des faits, réclamant cinq ans de prison pour l’ex-agent de la PAF, assortis d’une amende de 1.900 euros et de la confiscation de son véhicule. Les autres membres du réseau risquent également de lourdes peines, allant jusqu’à trois ans de prison ferme pour certains, et l’interdiction définitive du territoire français pour d’autres. Le délibéré du tribunal est attendu avec attention, tant les enjeux autour de l’immigration clandestine à Mayotte continuent de cristalliser les tensions.