A Chiconi, Mirella Soamiadana Issouf patiente, avec son bébé dans les bras. Elle fait partie de la trentaine d’habitants à veinir récupérer des bouteilles d’eau. « Ça coûte trop cher d’en acheter mais maintenant on est soulagé », confie la jeune mère. Ce lundi 20 novembre, la distribution de bouteilles d’eau à toute la population de Mayotte a démarré. Jusque là, seules les 60 000 personnes les plus vulnérables – âgées, en situation de handicap ou les femmes enceintes – bénéficiaient de deux litres par jour. Mirella Soamiadana Issouf pouvait récupérer un litre par jour pour son nourrisson. Mais désormais, toute la famille pourra en profiter.
Un litre par jour et par personne
Au total, « 330 000 litres » devraient être distribués chaque jour à Mayotte. Comme l’a promis Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer, le 2 novembre, à l’occasion d’une visite sur l’île. Soit un litre par jour et par personne. Car l’île fait face à une pénurie sans précédent. Les deux retenues collinaires du territoire – qui assurent 80 % de l’approvisionnement avec les rivières – devraient être à sec dans les jours qui viennent. « Autour du 22 novembre », selon une source proche du dossier. Le 13 novembre, elles n’étaient plus remplies qu’à environ 6 % contre 58 % en moyenne, à la même période l’année dernière. Lorsqu’elles seront vides, le territoire ne sera capable de produire que 20 000 m³ par jour alors que la consommation journalière stagne autour de 26 000 m³, malgré des coupures d’eau deux jours sur trois pour les quelque 310 000 habitants de l’île.
A Chiconi, ce lundi matin, chaque habitant doit s’identifier auprès des agents du centre communal d’actions sociales (CCAS) grâce à un justificatif de domicile et aux pièces d’identité des membres du foyer. « C’est une aide qu’on ne peut pas rater. On ne peut plus boire l’eau du robinet, regrette Amina, mère de trois enfants. On a eu des diarrhées, des vomissements. » Depuis, la mère de famille achète de l’eau en bouteille. Mais à « environ 8 € le pack, ça pèse lourd dans le budget», soupire-t-elle. Après une heure et demie, coincée dans la file d’attente, la mère de famille récupère les précieuses bouteilles.
150 sapeurs-pompiers et militaires de la sécurité civile arrivés sur l’île
En trois heures de distribution, 400 personnes sont déjà reparties les bras chargés. Mais près de 1600 personnes sont attendues au fil de la journée. Pour fluidifier les passages, la mairie avait pourtant anticipé. « Dès la semaine dernière, les inscriptions étaient ouvertes au CCAS », souligne Djamael Djalalaine, directeur de cabinet du maire. Une démarche qu’Amina avait faite mais qui ne lui a pas permis d’échapper à la file d’attente. Quatre agents du CCAS et de la mairie sont pourtant épaulés par quatre jeunes en formations au régiment du service militaire adapté (RSMA), qui assurent la manutention. « Une équipe de 30 personnes au total, avec des membres de la sécurité civile mais aussi des bénévoles, pourra être mobilisée. Et nous pouvons aussi faire venir une équipe de réservistes en renfort si les effectifs ne suffisent pas », poursuit le directeur de cabinet du maire. Sur l’île, 150 sapeurs-pompiers et militaires de la sécurité civile sont arrivés ces dernières semaines pour venir en renfort et assurer la distribution à toute la population.
A Chiconi, la mairie a également choisi de faire venir les 13 500 habitants de la commune par zone, pour fluidifier les distributions. « Elles auront lieu toute la semaine, jusqu’au samedi, pour permettre à ceux qui travaillent de venir. On accepte absolument tout le monde, sans distinction », assure Djamael Djalalaine, qui précise que les services de la mairie distribueront également des bouteilles à domicile aux personnes « en grande vulnérabilité, isolées et qui ne peuvent pas se déplacer. »
Et pour limiter la pollution plastique, un container vide permettra de collecter les bouteilles qui seront ensuite envoyées en métropole pour être recyclées. Les habitants devront alors ramener leurs contenants vides pour bénéficier de nouvelles bouteilles.