À l’heure où l’océan Indien reconnaît officiellement l’ampleur du VIH dans la zone, l’île, elle, attend encore des réponses concrètes rapporte le Journal de Mayotte. Une lassitude parfaitement résumée par Moncef Mouhoudhoire, directeur de Nariké M’Sada : « Rien de neuf, Mayotte reste le deuxième département français le plus touché. »
Sur le terrain, les chiffres racontent une histoire bien plus brutale que les discours officiels. En 2023, l’île enregistrait 92 nouveaux cas, un taux près de six fois supérieur à celui de la métropole hors Île-de-France. Un an plus tard, le camion de dépistage de Nariké M’Sada relevait certains jours trois à quatre séropositivités en quelques heures à peine. La file active ne cesse d’enfler : 324 patients suivis en 2019, 505 en 2023, et désormais 624 selon l’ONG Ravane OI. L’hôpital de Mamoudzou tente de tenir le rythme, les CeGIDD sillonnent le territoire, et les associations multiplient les opérations de terrain pour contourner les obstacles logistiques, administratifs et sociaux. Mais la réalité demeure : Mayotte dépiste beaucoup… parce qu’elle découvre toujours plus de cas.
La crise prend une dimension nouvelle en 2025, lorsque les pays voisins commencent à se mesurer au même mur. Aux Comores, les chiffres doublent en un an, passant de 37 cas déclarés à 74. À Madagascar, l’explosion des infections depuis 2006 et la chute des financements laissent apparaître une épidémie enracinée, masquée trop longtemps. Rodrigues demeure dépourvue de stratégie de réduction des risques, tandis que Maurice et les Seychelles affichent des taux de prévalence alarmants chez les usagers de drogues injectables et les travailleurs du sexe. Mayotte n’est plus l’exception. Elle apparaît désormais comme l’avant-poste d’une crise régionale où chacun agit en ordre dispersé.
Dans ce contexte, la rencontre prévue le 1er décembre à Cavani prend des allures de test collectif. Autour de la table : ARS, Santé publique France, CSSM, CHM, CeGIDD, Département et associations. Officiellement pour dresser un bilan des dispositifs lancés depuis fin 2024. Officieusement pour répondre à une question simple : toutes ces mesures ont-elles vraiment permis de rattraper les retards de diagnostic et d’améliorer l’accès aux soins dans un territoire où la moindre démarche administrative peut devenir un obstacle de plus ?
Car malgré la reconnaissance tardive de l’urgence par l’océan Indien, Mayotte reste, faits en main, l’un des territoires français les plus touchés. Les acteurs de terrain n’attendent plus de constats : ils veulent des engagements clairs, une coordination réelle, et surtout une continuité de soins sans interruption ni impasse. « Tout le monde sait que la situation est grave. La vraie question, c’est : est-ce qu’on avance ? », résume Moncef Mouhoudhoire.



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