Depuis le 1er juillet, six décrets ont été publiés pour tenter de rendre le territoire plus attractif aux yeux des professionnels de santé. Une stratégie d’urgence où les primes pleuvent, mais où les maux de fond restent entiers rapporte le Journal de Mayotte.
Avec un seul hôpital pour plus de 321 000 habitants, Mayotte voit son système de santé chanceler. Faute de personnel, les maternités du nord et du sud ont fermé leurs portes. Les rotations d’intérimaires, trop courtes pour assurer une continuité, se succèdent dans un contexte tendu. Face à cette réalité, l’État mise sur des primes et des mesures exceptionnelles pour inverser la tendance.
Les sages-femmes peuvent désormais toucher l’équivalent de deux mois de salaire en prime d’engagement, les infirmiers ou manipulateurs radio 2 200 € par an. Les praticiens hospitaliers, eux, pourront conserver une indemnité de sept mois de salaire pour un an d’engagement seulement. Autre mesure : les règles de recrutement ont été temporairement allégées, et des bonifications de carrière mises sur la table pour ceux qui tiendront plusieurs années.
Si la direction du Centre Hospitalier de Mayotte salue l’initiative, elle pointe déjà des flous : « Ces décrets tombent en pleine période de vacances. Beaucoup de soignants sont absents. Et sur le terrain, on ignore encore comment ces mesures vont s’appliquer, notamment pour les médecins. »
Plusieurs professionnels restent sceptiques. Une infirmière installée depuis trois ans confie : « Les primes font venir, mais elles ne font pas rester. Quand on galère à trouver un logement, qu’on n’a pas d’eau au robinet pendant des jours, qu’on subit l’insécurité ou les bouchons pour venir bosser… la motivation s’effrite vite. »
La crise de l’eau, les coupures d’électricité, l’insécurité aux abords des structures de soin, l’insuffisance de logements et le manque de places en crèche ou à l’école rendent l’installation difficile, voire dissuasive pour les familles. À cela s’ajoute une pression quotidienne sur les services de santé : services débordés, équipements vétustes, et spécialités manquantes.
Les mesures gouvernementales, bien qu’accueillies comme un signal fort, sont jugées insuffisantes. Car au-delà de l’incitation financière, c’est tout un territoire qu’il faut rendre vivable, pour espérer retenir durablement les compétences indispensables à son système de santé.