Une opération strictement réservée aux entreprises, notamment les supermarchés, alors même que des milliers de foyers restaient privés d’eau courante rapporte Mayotte Hebdo.
Ces bouteilles ne sortent pas de nulle part. Selon plusieurs sources locales, elles provenaient des stocks d’aide humanitaire constitués après le cyclone Chido, en janvier dernier. Destinées à la population sinistrée, elles seraient arrivées trop tard pour être distribuées.
« Pendant Chido, on n’a pas reçu d’eau. Elle est arrivée après la crise, et les communes ont fini par refuser de la distribuer, de peur d’être accusées de favoritisme », confie un témoin sous couvert d’anonymat.
Une deuxième vente devait avoir lieu en octobre, mais elle a été annulée à la dernière minute, en pleine période de tours d’eau de 96 heures, alors que plusieurs villages du Sud et de l’Ouest n’avaient plus une goutte à boire. Les douze conteneurs restants ont finalement été redistribués aux mairies.
Pour une île déjà marquée par la pénurie chronique, l’image choque : l’eau de secours mise en vente comme une denrée commerciale. Une ironie amère dans un département où près de 30 % des habitants n’ont toujours pas accès à l’eau potable à domicile, et où les robinets restent à sec plusieurs jours par semaine.
L’État, de son côté, rappelle que 730 millions d’euros ont été prévus dans le plan eau 2024-2027, censé mettre fin aux restrictions d’ici 2026. Mais les faits contredisent les promesses : un arrêté préfectoral du 13 octobre encadre encore les prix de l’eau en bouteille, preuve que la crise perdure.
La vente aux enchères pose une question fondamentale : peut-on vendre un bien vital dans un territoire où l’eau manque ?
La France a pourtant soutenu la résolution 64/292 de l’ONU, qui reconnaît « le droit à une eau salubre et propre comme un droit fondamental de l’homme ». Le Code de l’environnement lui-même en fait « un patrimoine commun de la Nation ».