Désormais, pour obtenir la nationalité française, un enfant né à Mayotte devra prouver qu’au moins l’un de ses parents résidait légalement sur le territoire depuis un an au moment de sa naissance – contre trois mois actuellement rapporte Mayotte La 1ère. La version initiale, plus sévère, exigeait trois ans de résidence régulière et pour les deux parents.
Ce rétropédalage partiel, soutenu par le rapporteur LR Stéphane Le Rudulier, vise à éviter une censure du Conseil constitutionnel. Le sénateur a notamment mis en garde contre un effet pervers : la possible explosion des reconnaissances frauduleuses de paternité pour contourner l’obstacle juridique. « Le texte doit être ferme mais tenable », a-t-il justifié.
La majorité sénatoriale, épaulée par le gouvernement, défend cette réforme comme une réponse à l’urgence migratoire que connaît l’archipel. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et de la Justice, a soutenu le texte, affirmant que la nationalité française ne peut continuer à être perçue comme un « aimant migratoire ».
Du côté des élus mahorais, le message passe, mais avec nuances. La sénatrice Salama Ramia, bien qu’alignée sur l’idée générale, a regretté le retrait de la condition impliquant les deux parents. « Mayotte suffoque, mais ce texte, à lui seul, ne suffira pas », a-t-elle concédé, appelant à des mesures plus larges et structurantes.
La gauche sénatoriale, elle, a dénoncé un texte de pure opportunité politique. « On ne choisit pas le lieu de sa naissance », a rappelé la communiste Évelyne Corbière Naminzo, qui déplore une loi ciblant les enfants plutôt que les causes profondes de l’immigration.
Même certains élus de droite concèdent que le durcissement de 2018, déjà en vigueur à Mayotte, n’a pas produit les résultats escomptés sur le terrain : le nombre de naissances et d’arrivées clandestines continue de grimper.
Le sénateur Saïd Omar Oili a voté contre, estimant que la loi donnera de « faux espoirs » aux Mahorais. Selon lui, l’urgence est ailleurs : encadrer plus fermement les cartes de séjour et mieux organiser la coopération régionale, notamment avec les Comores.
Avant d’entrer en vigueur, le texte passera par une commission mixte paritaire, où députés et sénateurs devront s’accorder sur un point clé : la condition de régularité s’appliquera soit à un seul parent, soit aux deux.
Derrière cette bataille juridique se joue un équilibre délicat entre volonté politique, contraintes constitutionnelles et réalité sociale d’un territoire aussi stratégique que fragile. À quelques semaines de l’examen final, la loi Mayotte pourrait bien s’inviter au cœur du débat national sur l’identité et l’égalité des droits.