Lors de l’audience du 28 mars, le président départemental du parti Les Républicains a dû répondre de contrats conclus avec des entrepreneurs locaux ne respectant pas les règles des marchés publics, ainsi que de la vente de terrains à des proches, notamment sa fille, à des prix avantageux (trois euros le mètre carré). Ce dernier point, constituant une prise illégale d’intérêts, avait fait l’objet d’une délibération du conseil municipal le 16 mai 2020. En revanche, il a été relaxé des charges d’atteinte à la liberté d’accès aux marchés publics.
Un terrain nu de 1 160 mètres carrés, situé entre la bibliothèque de Mroalé et la route départementale, avait été vendu à quatre acquéreurs. Fixé à trois euros par mètre carré, le prix total s’élevait à 3 480 euros. Face aux critiques d’une élue d’opposition, le maire avait dénoncé une cabale politique, arguant que ce tarif préférentiel était appliqué à Tsingoni depuis la régularisation foncière des propriétaires déjà installés. Cependant, il s’agissait ici d’acquisitions et non de régularisations. Face au tollé provoqué, le conseil municipal avait annulé cette délibération en février 2022.
Concernant les marchés publics, c’est la chambre régionale des comptes (CRC), chargée du contrôle financier des collectivités, qui avait détecté un problème.
En effet, plusieurs marchés avaient été découpés de manière à éviter de dépasser les plafonds nécessitant une procédure de mise en concurrence plus stricte, une pratique connue sous le nom de « saucissonnage »: la rénovation de l’école de la mosquée du vendredi de Tsingoni en 2016 avait donné lieu à deux factures distinctes, l’une de 58 000 euros pour l’extérieur et l’autre de 66 700 euros pour l’intérieur. En les regroupant (pour un montant total de 124 700 euros), elles dépassent le plafond de 90 000 euros, ce qui aurait nécessité une publication au Bulletin officiel des marchés publics et des annonces légales.
Des irrégularités similaires ont été relevées concernant des travaux effectués sur les terrains de football de la commune. De plus, si une mise en concurrence avait bien eu lieu pour ces marchés, aucune trace de devis ne subsistait à la mairie. Le maire avait affirmé, lors de l’audience du 28 mars, que des problèmes d’archivage persistaient à la mairie, mais qu’il y avait eu des progrès réalisés depuis. Il avait également pointé du doigt son ancien adjoint, qu’il considérait comme responsable de ces irrégularités. Pourtant, lors des auditions, l’une des employées municipales avait affirmé que le maire prenait « seul’ ses décisions.
Une condamnation assortie d’une exécution provisoire.
Pour prise illégale d’intérêts, Bacar Mohamed, qui occupe le poste de maire de Tsingoni depuis 2014 et est actuellement candidat aux élections sénatoriales, a été condamné à douze mois de prison avec sursis, ainsi qu’à une peine d’inéligibilité de trois ans et à une amende de 15 000 euros. La vice-procureure, Delphine Moncuit, avait requis une peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution provisoire, ainsi qu’une peine de vingt-quatre mois de prison avec sursis simple et une amende de 7 000 euros.
Deux entrepreneurs mahorais, le gérant d’une entreprise de peinture à Tsingoni et un spécialiste de l’équipement sportif du nord de Mayotte, ont également été condamnés pour avoir profité de ces marchés publics irréguliers. Le maire de Tsingoni devra désormais faire face aux conséquences juridiques et politiques de cette condamnation, « De toute évidence, face à ce procès purement politique, je ne me laisserai pas facilement abattre et me réserve le droit, en concertation avec mon avocat, de faire appel pour laver mon honneur », a-t-il déclaré selon mayottehebdo.com