Une inauguration qui n’a rien d’anodin : derrière le ruban coupé, il y a l’histoire d’un village qui a vu ses besoins exploser beaucoup plus vite que ses infrastructures rapporte le Journal de Mayotte.
À Mayotte, les PMI sont des pièces maîtresses du paysage sanitaire. Suivi des grossesses, vaccinations, dépistages, accompagnement social des familles : elles irriguent le quotidien de milliers de femmes et d’enfants. Pourtant, pendant longtemps, celles de Koungou n’avaient que des locaux exigus et saturés, installés dans le dispensaire communal. En 2006, quand la compétence PMI passe au Département, aucune enveloppe financière nouvelle n’arrive avec elle. Résultat : aucune construction prévue, malgré l’explosion démographique et des besoins de plus en plus criants.
Il faut attendre 2018 pour que l’État se décide enfin à compenser financièrement le transfert de compétence. L’idée d’une PMI à Koungou ressurgit alors, mais les fonds destinés à sa construction sont partiellement redirigés vers l’Aide sociale à l’enfance. Le projet avance d’un pas, recule de deux. Et les vieux locaux continuent de saturer.
La situation devient intenable en 2021. Les consultations explosent, le personnel manque, les familles patientent des heures. Une évidence s’impose : il faut une nouvelle structure. En 2022, le dossier se concrétise enfin… avant de se heurter à un nouvel obstacle, cette fois foncier. Le terrain choisi est classé en zone naturelle. La DEAL refuse le permis de construire. Pour débloquer la situation, la mairie doit engager un déclassement, modifier le PLU, lancer une enquête publique. La machine administrative se met en route, lente et pesante, tandis que les familles, elles, n’ont d’autre choix que d’attendre.
Lorsque le bâtiment est enfin prêt, fin 2024, le cyclone Chido frappe l’île et endommage la structure neuve. L’ouverture, une fois de plus, est reportée. Mais la demande, elle, ne faiblit pas. Dès l’aube ce lundi, plusieurs femmes enceintes patientaient déjà devant le bâtiment flambant neuf, prêtes à rencontrer les équipes pour un suivi indispensable. Chaque année, les PMI de Mayotte accompagnent environ 8 000 grossesses sur 10 000 enregistrées, et assurent la quasi-totalité des vaccinations infantiles.
Le Dr Pierre Sauves, directeur des PMI au Département, ne boude pas son soulagement : « Le projet a mis du temps, mais ces locaux répondent enfin aux besoins de Koungou. Les familles n’auront plus à se rendre jusqu’à Mamoudzou, où les embouteillages peuvent ajouter deux heures à un simple trajet. » Pour nombre de femmes, cette nouvelle proximité change tout.
La structure, étalée sur deux niveaux, mêle soins médicaux, accompagnement social et espace dédié au Lieu d’Accueil Parents-Enfants (LAEP). Les équipes — sages-femmes, infirmières, psychologue, éducateurs santé, conseillères conjugales — peuvent désormais travailler côte à côte, orienter directement les familles, éviter les renvois vers d’autres communes. L’objectif est clair : réduire les ruptures de parcours, offrir un accueil unique, fluidifier chaque étape d’un suivi qui, jusque-là, ressemblait parfois à une course d’obstacles.
Coût total du projet : un peu plus de 3 millions d’euros, financés en grande partie par le FEDER et le Conseil départemental. Cette ouverture s’inscrit dans un programme plus large : après Mtsamboro en septembre, plusieurs PMI doivent être rénovées ou reconstruites à Iloni, Mronabéja, Mtsapere, Vahibé ou encore Chiconi. Certaines, comme celles de Dzoumogné, Poroani ou Bandrélé, ont été ravagées par le cyclone Chido et des actes de vandalisme, fragilisant encore le maillage sanitaire de l’île.



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