Dans l’ombre des bidonvilles, des pompiers venus soigner ceux qu’on ne voit pas

par | 3 Jan 2025 | Social, Société

À Kahani, au cœur de Grande-Terre, l’urgence ne se mesure pas seulement en litres d’eau ou en sacs de riz.


Ce jeudi, c’est un autre combat qui se joue : celui de la santé. Loin des projecteurs, une trentaine de sapeurs-pompiers, déployés depuis la métropole, s’engagent dans une mission aussi discrète qu’essentielle : soigner, écouter et soulager les habitants des bidonvilles.

Dans ces quartiers où chaque journée commence par la quête de nourriture et d’eau, la santé passe souvent au second plan rapporte Mayotte Hebdo. « Salam alikoum, un docteur est là », lance Fatima Mouhoussini, figure engagée de l’association Malezi-Ya, sillonnant les ruelles poussiéreuses pour avertir les familles. Sous le poids de la chaleur écrasante, des mères de famille, des enfants malades, des hommes fatigués répondent timidement à l’appel. L’un d’eux confie : « Mon fils vomit depuis hier, je viendrai tout à l’heure. »

Ici, point de poste médical clinquant ni de tente siglée. « On nous a déconseillé de monter la tente PMA (poste médical avancé), les habitants craignent trop les contrôles aux frontières », explique José Navarro, lieutenant venu de l’Hérault. Alors, c’est sous un simple faré, près du city-stade, que les consultations prennent place. Des tables et chaises d’écoliers deviennent l’espace de soins, et la file s’étire lentement.

Les blessures sont souvent invisibles, sauf pour ceux qui savent regarder. « Des plaies infectées, des bronchites qui traînent depuis des semaines », décrit Marion Remeur, pompier de Toulouse. Certains patients n’ont jamais franchi la porte d’un dispensaire. Safiata, mère célibataire, résume d’une voix lasse : « Je ne peux pas attendre des heures au dispensaire, je n’ai personne pour garder mes enfants. Là, c’est à deux pas. »

Depuis leur arrivée, ces soignants de l’urgence ont pris en charge plus de 540 personnes, jusqu’à 80 par jour dans certaines localités comme Tsararano. Pourtant, malgré la dévotion, ils savent l’ampleur du chemin à parcourir. « Ce que nous faisons, c’est une goutte d’eau », admet humblement le docteur Philippe Poinot. Mais une goutte qui, pour ceux qui l’ont reçue, fait toute la différence.


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