Sur une île où les bidonvilles abritent des milliers de vies souvent invisibles, établir un décompte précis des victimes relève d’un défi colossal rapporte Mayotte La 1ère.
« C’est extrêmement difficile d’avoir un bilan officiel », a admis le préfet sur le plateau de Mayotte la 1ᵉre. Si l’hôpital de Mamoudzou (CHM) recense 9 morts et 5 personnes en urgence absolue, les scènes de dévastation dans les bidonvilles laissent présager bien pire. « Ce chiffre n’est pas plausible lorsqu’on voit les images des quartiers précaires», reconnaît-il.
Sur le terrain, la réalité est implacable. Dans la commune de Koungou, une femme a trouvé la mort lorsqu’une tôle, emportée par des rafales de 200 km/h, l’a frappée. Enterrée quelques heures plus tard, selon la tradition musulmane, sa disparition illustre l’invisibilité des victimes.
Les chiffres officiels ne capturent pas l’ampleur du drame, notamment dans les bidonvilles, où vivent près de 100 000 personnes. Ces quartiers, constitués de logements en tôle, ont été presque entièrement balayés par le cyclone. Avec des routes impraticables et des déchets obstruant encore les rues, de nombreuses zones restent inaccessibles. La mairie de Koungou, disposant de moyens limités, peine à déblayer les débris, et certains lieux n’ont toujours pas été atteints.
L’invisibilité des populations accentue le problème. Dans les forêts, des familles vivent en marge, loin des regards et des contrôles. Ces personnes, souvent sans papiers ni existence administrative, sont quasiment introuvables. La députée Estelle Youssouffa n’hésite pas à qualifier les bidonvilles de « charniers à ciel ouvert » : « La plupart des familles ont refusé de s’abriter. Si on n’a jamais vécu un cyclone, on ne comprend pas l’ampleur du danger. »
Pour tenter de recenser les victimes, les autorités se tournent vers les associations locales, mais le processus sera long. Selon la députée, il faudra attendre plusieurs semaines, voire la rentrée, pour avoir une estimation plus précise. D’ici là, des milliers de morts pourraient rester anonymes, enterrés sans registre et sans reconnaissance. Les enfants, en particulier, pourraient représenter une proportion importante des victimes.