Le village de Mramadoudou tourne au ralenti depuis lundi dans la nuit. De part et d’autre de la route, des barrages ont été dressés par les habitants. A l’intérieur, seuls les piétons sont autorisés. Vers l’ouest, les véhicules sont stationnés les uns derrière les autres, des deux côtés de la chaussée. « On en a marre des vols et du vandalisme sur nos véhicules et nos biens », lance César* un habitant du village, qui souhaite conserver l’anonymat par peur des représailles. Devant des bennes à ordures, du mobilier et autres pneus entassés, il pointe la responsabilité d’un occupant d’un terrain du conseil départemental, qu’il utiliserait illégalement.
« Cet homme a construit des bangas sur ce terrain qui ne lui appartient pas. Il les loue à des personnes mineures comme majeures, sans papier, qui racket les habitants pour lui verser un loyer. Et il s’adonne à des activités de proxénétisme avec des jeunes femmes venues des Comores », assure-t-il. A ses côtés, une autre habitante complète, « l’affaire date de 2018. On demande aux autorités de l’expulser mais rien n’est fait. »
Seule option pour continuer à circuler : faire demi-tour
Ce mercredi, Mohamed*, bidons à la main, se dirige vers la station essence à pied. « C’est la galère », soupire-t-il, sous une chaleur de plomb. Assani*, de son côté, est venu récupérer une pièce auto. « J’ai garé ma moto devant les barricades, on n’a pas le choix », lance-t-il. Seule option pour continuer à circuler : faire demi-tour. Du moins quand c’est possible. Car le sud du territoire ne possède qu’une route pour rejoindre l’est ou l’ouest. Et côté est, des affrontements à Dembéni, ont bloqué à plusieurs reprises la circulation.
Bloqué de 5 h à 16 h 30 sur la route
Damien*, un habitant de Chiconi, s’est retrouvé ainsi bloqué dans le sud mardi soir. « J’ai été obligé de passer la nuit à Bouéni, chez un ami », raconte-t-il. Omar*, habitant Sada, a, quant à lui, patienté de longues heures avant de pouvoir rentrer chez lui. Ce coordinateur administratif dans une association basée à Tsoundzou, n’a pas pu se rendre au travail mardi matin. « Je suis parti à 5 h, la route était bloquée du côté de Tsararano. On m’avait prévenu que le passage était impossible au niveau de Combani, à cause des affrontements, j’ai donc décidé de passer par le sud. » Mais après avoir réussi à traverser le village de Mramadoudou, l’automobiliste s’est retrouvé pris au piège du côté d’Iloni. « C’était une zone de guerre à ce moment-là. Je suis redescendu mais je me suis retrouvé bloqué à Mramadoudou, impossible de faire marche arrière. » L’homme a fait demi-tour « 6 à 7 fois » en espérant que la situation se débloque. Et ce n’est que vers 16 h 30, après avoir négocié avec les gendarmes qui barraient la route du côté de Dembéni, qu’il a tenté de rejoindre l’ouest. « Je suis passé au milieu d’une bande de jeunes armés et cagoulés. Heureusement, ils n’ont pas trop prêté attention à moi et j’ai enfin pu rentrer », raconte-t-il.
A Mramadoudou, alors qu’une cinquantaine d’habitants bloquaient toujours les deux entrées du village en début d’après-midi ce mercredi, César * assurait que l’axe serait bientôt libéré. « Ce n’est pas grâce aux autorités mais nous avons réussi à faire fuir l’homme qui nous cause toutes ces nuisances », précisait-il.